La neige se fait de plus en pressente sur la route, nous quittons les hauts plateaux et la route continue dans une vallée étroite. La succession des paysages est magnifique même si le temps est plutôt pourri. 60kms avant Khorog, je descends du véhicule pour rester dans un village (car il est déjà bien trop tard pour que je règle mes affaires aujourd'hui). Tout de suite, des jeunes à l'extérieur d'une maison me font signe, sous les flocons de neige. J'y vais.

Me voila au Tadjikistan pour de bon, dans une famille pamire !! Les personnes sont trop gentilles, je suis assez impressionné. Alors la, c'est vraiment du neuf, de la découverte, et c'est très excitant. Complètement différent de ce que j'ai vu avant, le visage des gens n'est plus de type asiatique.. plus tourne vers un type arabe, d'orient.


La langue tadjik est une langue perse, contrairement aux pays d'avant ou ce sont des langues turques. Par ailleurs, le Tadjikistan étais le dernier pays de l'empire russe avant d'être chez les anglais, en Afghanistan. Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, ainsi que Ouzbekistan et Turkmenistan sont des republiques d'ex-URSS, devenues indépendantes en 1991.


Je continue ma route vers Khorog, je marche beaucoup à pied au début, car il n'y a pas de véhicules. Tous les gens que je croise sont très gentils (j'en aurai les larmes aux yeux à un moment), je suis beaucoup invité dans les maisons, de belles maisons d'ailleurs. La maison pamire est typique : des estrades sur les cotes de la pièce, le poêle au milieu, de grosses poutres en bois au plafond, une lucarne dans le toit.. je kiffe un max, ça à du style !!

Un Waz finit par passer, un marchroutka quoi, transport local : OK, droit sur Khorog. Les nuages laissent place à un gros ciel bleu sur la fin, le décor est à couper le souffle : les montagnes montent très haut à droite et à gauche, bien à pic, la rivière dans le fond de la vallée, c'est impressionnant. Arrivé sur Khorog, environ 2000m, le cadre est magnifique, l'Afghanistan est en face.


Je reviens alors sur le permis GBAO. Après avoir vu la meuf d'une agence pour essayer d'avoir ce permis, ce qui n'est d'ailleurs plus possible car je suis déjà sur place, je finis à l'OVIR. Mon cas est super merdique : je suis arrivé ici sans permis et cela fait déjà 4 jours que je suis sur le territoire, sans être enregistré (cela doit se faire dans les 3 premiers jours normalement). Bref, en vue de la loi numéro tactac de la république du Tadjikistan, je prends une belle amende !! Allez Morisse, t'as fait le malin à entrer comme ça, tu paies 312 dollars maintenant !! Wapatcho, c'est la fête et impossible de négocier quoi que ce soit. Heureusement (pour moi), l’amende est basée sur le salaire mensuel minimum d'un tadjik qui n’est que de 5-6 dollars. Bon point par ailleurs : j'ai mon permis GBAO gratos.

Voila donc la situation. Sauf que je n'ai pas assez d’argent sur moi, il y a une banque qui accepte la carte bancaire, mais les connexions avec le centre à Dushanbe se font mal, donc ça ne marche pas, et tout ferme car c'est la fin de la journée. Et le pire, c'est que les 5 jours à venir sont féries... donc RDV à l'OVIR dans 5 jours, ma CB restant en consigne ici.

Dans les environs de Khorog pour les jours à venir, je n’ai que des emmerdements, mais cela ira en s’améliorant au fur et à mesure. Je ne détaille pas tout ce que je vois, je résume en quelques points :

- festivités de Navruz, dans le village de Bakhrushan notamment, dans un décor incroyable. Les montagnes afghanes en toile de fond, des combats d'un genre judo et lutte, leur sport national, des matchs de volley, de la musique, grosse ambiance quoi, c'est la fête.



- je suis invité coup sur coup par les locaux. Les gens sont trop accueillants, je n'ai jamais vu cela auparavant. je deviens même fatigué de ces rencontres. Mais c'est tellement sympathique, ces personnes qui me font signe pour partager un moment ensemble, boire le thé, manger, et plus si affinités.

- un mariage pamir dans le tout petit village de Yemtz. C'est la soirée plus que magique. Après 15 bornes à pied et quasiment tout de nuit, je débarque dans le bled et trouve 200-300 personnes en train de fêter l'événement sous les arbres. Tout le monde danse, les femmes poussent des cris aigus, tapent dans les mains avec du rythme, il y a la chanteuse avec la voix qui tue tout, c'est super. Dans une maison ensuite, tous entassés, un type avec un tambour et un autre à l'accordéon entrent, magique !!



- les paysages dans lesquelles je me trouve sont magnifiques , c'est beau de chez beau. Dans des vallées, les rivières, les grandes montagnes enneigées, le soleil qui va avec.. Mais par contre, cela dégringole de partout, de la caillasse mais surtout de grosses coulées de neige de printemps, c'est la saison. Ces avalanches sont d'ailleurs le gros problème de ces régions, avec ceux de la flotte à gérer et tous les aménagements qui vont avec.

- la vie dans ces villages est basée sur l'autosuffisance. Tout le monde cultive et possède des bêtes (vaches, chèvres, moutons, poules...) Tant qu'il y a de l'eau, il y a de la vie, aouh !! Les gens sont très débrouillards. Il y a aussi des échanges avec les villages afghans de l'autre coté de la rivière. Je t'apporte un sac de farine, tu me files du bois, et tu traverses la rivière sur une chambre à air de Kamaz avec des petites rames. Pour l'électricité, les petites centrales font ce qu'elles peuvent, mais ce n'est pas toujours du continu.


- proche de Khorog, un soir, je me cale avec la tente sur le bord de la rivière. Et voila qu'en remontant de la flotte où je me lavais un peu, je tombe nez à nez avec 3 soldats, ou plutôt avec 3 mitraillettes. Il fait nuit, le moment est tendu, et je capte qu'il fallait pas camper là, c'est clair. La frontière coté tadjik est gardée en continu par des soldats, pour éviter des infiltrations d'afghans terroristes par exemple.. mais, c'est quand même une frontière passoire, et il passe un paquet de drogue. Dommage, le coin étais au top... et dire que dans l'après-midi je déconnais avec d'autres soldats. La soirée sera longue et je dormirai au QG de l'armée à Khorog. Pas de soucis quoi, j'avais oublié.. mais cela m'a donné à réfléchir.

Khorog et retour à l'OVIR, je vais galérer un peu pour retirer de l’argent, mais ça finira par être bon. Je paie et je me casse, direction Dushanbe, sans trop tarder car mon visa tadjik expire dans quelques jours et je n'ai pas envie de prendre une autre amende.





De Murghab à Khorog